mardi 30 janvier 2018

Le dernier Mustela.

Oui je sais, le Mustela c'est plein de caca, ça coûte la peau des fesses, bref, c'est pas bien. 

Sauf que moi, j'adore l'odeur du Mustela. Et comme un mouton, depuis que mon fils est né, je ne l'ai lavé qu'avec ça. Quand il a fait son eczéma, je suis passée à quelque chose de plus "healthy" comme on dit aujourd'hui, mais j'utilisais toujours le Mustela pour les cheveux, juste pour l'odeur. J'ai essayé d'autres produits, mais rien à faire, c'est Mustela que j'aimais le plus.

Au fil des promos et des dons, j'ai réussi à tenir jusqu'ici mais il est temps que je sorte ça de mes "extras" financiers. 

Et puis surtout, mon fils va avoir 5 ans quoi. 

C'est plus un bébé. On a rangé les couches et la poussette depuis 2 ans (encore que la poussette est de retour mais c'est pas de gaité de coeur), les biberons l'année dernière, le parc et la chaise haute ont été vendus... bref, petit à petit on oublie. 

Ce n'est pas vraiment un "manque" de bébé. Avoir un grand garçon c'est super aussi. ça dort, déjà. Et puis c'est rigolo. C'est une fierté de le voir grandir chaque jour et de voir sa personnalité s'affirmer. Et je papouille des bébés toute la journée alors bon, le manque se gère quand même. 

Mais les odeurs et moi c'est tout une histoire. Je déteste certains parfums juste parce qu'ils ont été associés à de mauvaises expériences quand j'étais enfant (c'est là que je me suis rendue compte que je détestais mon orthophoniste). 

Alors ça faisait plusieurs semaines que j'essayais de me convaincre "à la fin de ce flacon, on passe à un shampoing de grand". J'ai même prévenu mon fils pour qu'il me remette dans le droit chemin si jamais je vacillais. 

Et voilà, il est fini. Cet après-midi je vais aller acheter un shampoing pour enfant, un autre, un du supermarché. 

Et je vais commencer mon deuil olfactif. 


vendredi 26 janvier 2018

Cet album qui a sauvé ma vie (avec de la musique dedans)


Oui je sais, le titre est racoleur. Comme si un album pouvait sauter dans la Seine pour me sauver de la noyade. Oui mais voilà, en le réécoutant l'autre jour, il se trouve que ça m'a sauté aux yeux ou du moins, aux oreilles. 

Il y a 20 ans (bordel) j'entrais au collège. Moi la gamine si différente des autres, j'entrais dans ce lieu sans pitié rempli d'adolescents aux codes vestimentaires et comportementaux qui m'échappaient totalement. Et pour la première fois de ma vie, en plus, j'étais séparée de ma meilleure amie de l'époque. J'ai passée l'année de 6ème en solitaire. 

Les années se sont écoulées, plutôt bonnes en matière de notes mais catastrophiques en terme de relations sociales. J'ai eu honte de moi, j'ai  pleuré, beaucoup. Ma mère s'est sacrifiée pour m'offrir des vêtements de marque en pensant que ça changerait quelque chose si je m'habillais "comme eux". 

Aujourd'hui c'est enfin un phénomène de société reconnu et pris au sérieux. 

Le harcellement scolaire. 


Les brimades, les rires, les bousculades, les coups, les crachats. 

Ce n'était pas normal. Mais à l'époque tout venait de moi, ça n'était que moi, moi l'intello coincée et gamine dans ma tête qui ne comprenais pas le monde dans lequel j'évoluais et qui n'arrivais pas à m'adapter aux autres.

Bref. 

Au printemps 2001, je finissais ma 3ème avec, enfin, la perspective de changer d'établissement, de passer au lycée et d'être enfin tranquille (rassurez-vous ça a été le cas). Notre prof d'espagnol était absent et on nous a proposé une prof d'espagnole remplaçante. 

Elle est arrivée dans la classe avec l'énorme radio-cassette de la classe (oui les enfants CASSETTE). Il y a eu quelques cris de ravissement dans la classe, c'était surtout l'occasion de glander pour la plupart d'entre eux. 

Elle nous a dit qu'on allait étudier un texte. Elle nous a distribué des polycopiés qui sentaient l'alcool et elle a pressé le bouton play. 

Et là j'ai été percutée. 

C'était Manu Chao. 


Et cet album c'était Clandestino

Ce qui m'a frappé c'est qu'il renversait toutes les codes musicaux que je pouvais connaître. Pour moi la musique c'était une mélodie, une ou plusieurs voix, un texte, un refrain. 

Manu est rentré là dedans comme un chien dans un jeu de quille. Avec lui ce ne sont pas les morceaux qui comptent. D'ailleurs, on ne peut plus s'en rendre compte maintenant, mais ses morceaux n'avaient ni début ni fin, ils s'enchainaient sur tout l'album. Un morceau de Manu Chao c'est un univers. Parfois une mélodie revient plusieurs fois. Parfois il aime un trait de cuivres qui va revenir en boucle. Il y ajoute des bouts d'un peu tout, des extraits de télévision, de radio, de son répondeur téléphonique et même les stations du métro madrilène. 

Nous avons étudié Clandestino, l'histoire d'un clandestin appelé à traverser par le rêve occidental qui s'est perdu lui-même dans le détroit de Gibraltar...

Et j'ai surtout eu une révélation avec la deuxième chanson, Desaparecido... L'histoire d'un homme perdu dans sa vie, perdu dans son monde, perdu dans son siècle, qui ne sait pas où il va, qui ne sait pas ce qu'il fait là et que les gens appellent "le disparu".... Qui court pour trouver une raison de vivre, une fin, une vie. Un homme qui porte en lui une douleur qui l'empêche de respirer, un moteur qui ne veut pas s'arrêter...  Qui a dans l'âme un chemin qui n'a pas de fin. Et il termine en disant : 

"Perdido en el siglo veinte, rumbo al veintiuno".

Je suis perdu dans le vingtième siècle, je cours vers le vingt-et-unième. 

Elle était là ma phrase. Une toute petite phrase. Celle qui a sauvé ma vie. Parce qu'il commençait à peine, ce vingt-et-unième siècle tant convoité. Parce que je finissais médiocrement ma vie de collégienne mais que je la finissais. Et comme je dis toujours, si à mon époque il y avait eu Facebook. Si le harcellement avait continué une fois fermée la porte de ma chambre, je pense que je ne serais pas là aujourd'hui. 

Alors voilà, j'ai demandé une copie de la cassette à la prof et pendant des années j'ai écouté cet album et le suivant en boucle. J'ai dansé dans le "Univers du Livre" du coin quand j'ai écouté l'album en live. 

En 2004, je suis allée à Madrid, je vous assure que j'ai fait le métro en long en large et en travers juste pour entendre, comme dans les chansons "Proxima Estacion" "Esperanza" "Avenida de la Paz" "Final de trayecto" (et pas "de tremiento" comme je l'ai cru des années et qui ne veut absolument rien dire). 

J'avais d'ailleurs prévu de partir en Erasmus en Espagne et de vivre là bas. Et puis l'Ex, la vie ... 

Mais aujourd'hui, je remercie mille fois Manu Chao et cette prof qui, sans le savoir, sans me connaître, a sauvé ma vie d'adolescente avec une simple cassette.